LA LEGENDE DU « BUTOR ETOILE »
Pour la petite histoire : un article du Dauphiné Libéré de mars 1964 L’étang de Pisieu (Isère) a son « serpent de mer » ! Il mugit la nuit et des centaines de personnes sont venues déjà l’écouter « Dans la longue plaine des « communaux » qui s’étend de Revel-Tourdan à Beaurepaire, le village de Pisieu est planté sur la colline comme un château de carte postale, il se reflète dans un étang. Jusqu’ici, l’étang de Pisieu était le paradis des pêcheurs et des chasseurs. Mais depuis un mois, la peur plane sur les eaux dormantes, et dans la région on n’hésite plus à parler du « monstre de Pisieu ». L’histoire commença par un cri inquiétant qui, chaque nuit, réveillait le voisinage. Au début, personne ne put situer exactement l’endroit, mais peu à peu on s’aperçut que cette espèce de beuglement de taureau en colère venait de l’étang. Les Pisillards se concertèrent ; les plus courageux se hasardèrent sur les berges, fusil en main et ne virent pas le moindre fantôme, ni la plus petite trace de monstre. Et pourtant, chaque soir, et plusieurs fois dans la nuit, le triple ou quadruple cri retentissait. Le bouche à oreille fonctionne bien dans nos campagnes, et rapidement la légende du serpent de mer de l’étang de Pisieu se propagea. Chacun rapporta sa petite anecdote ; un témoin assurait avoir vu des vagues comme si un être voulait soudain sortir de la vase. Un autre racontait, dans un bal, qu’il avait aperçu des yeux briller à la surface. Du coup, des danseurs quittèrent provisoirement le bal dans l’espoir d’assister en frissonnant à l’apparition de l’animal fabuleux ! Le jour de Pâques, plus de deux cents personnes défilèrent près de l’étang ; et mercredi, alors que la nuit était tombée depuis longtemps, on dénombra vingt-quatre voitures. Ce soir-là encore, le mugissement assourdi perça la surface de l’onde calme. Quel fut le premier Pisillard à parler de Butor ? Personne ne put nous renseigner. Mais dans le village on a sorti les « Larousse » et chacun croit avoir trouvé la solution puisqu’on peut lire : Butor : « échassier nocturne farouche qui vit dans les marais. Le mâle donne de la voix en mettant la tête dans l’eau et produit un mugissement pareil à celui du taureau ». Mais, Mr Monnet, épicier et grand chasseur est cependant septique : « j’ai déjà tué deux butors dans la région, et ils ne faisaient pas ce bruit-là ; et puis la bête se déplace puisqu’on la repère d’un côté ou de l’autre de l’étang dans les roseaux. D’ailleurs, avec les pierres que les gosses ont lancées, un oiseau se serait envolé ». Même son de cloche chez Mr Emptoz, propriétaire de l’étang et boulanger à Beaurepaire : « Avec le siège que nous avons mené mercredi après-midi, un oiseau aurait manifesté sa présence ». Le mystère reste donc entier, d’autant que depuis hier le monstre s’est tu. Est-il mort ? Est-il parti ? Bien sûr, on pourrait vider l’étang, mais il contient deux tonnes et demie de poissons et les pêcheurs attendent impatiemment l’ouverture. »